Ils étaient 14 artistes réunis à la Casa de Velázquez-Académie de France à Madrid, de septembre 2023 à juillet 2024. L’Académie des beaux-arts accompagne et suit pas à pas les artistes résidents, depuis leur sélection jusqu’à la présentation de leurs projets réunis dans une exposition collective. Le pavillon Comtesse de Caen offre, chaque année, un bel écrin à l’exposition collective de chaque promotion. Kaléidoscope est à découvrir en toute liberté, quai Conti, du 6 février au 9 mars 2025.

En cette date du 5 février 2025, lors vernissage de l’exposition Kaléidoscope et des discours d’accueil, le secrétaire perpétuel de l’Académie, compositeur et chef d’orchestre Laurent Petitgirard, à propos des coupes budgétaires visant les arts et la culture, soulignait que l’Académie des beaux-arts appelle au dialogue et à la responsabilité. Elle dénonce « la violence et l’absence totale de concertation et de transparence dans des décisions unilatérales prises au niveau de collectivités locales de tous bords politiques… (voir la note°1 en fin d’article) »

Claude Bussac est la directrice des études artistiques à la Casa de Velázquez.
Commissaire de l’exposition, elle l’a pilotée.
Elle a veillé à ce que le travail créatif personnel de chaque résident constitue une des facettes, un des reflets du Kaléidoscope de cette 94e promotion.
Les artistes offrent une multiplicité d’images en mouvement après une année de recherche, d’échanges, d’influences sur leur travail, mais aussi d’amitié.
Résidents de 8 nationalités, ils ont travaillé sur le thème de la société contemporaine, réunissant leurs visions.
Nancy Berthier, directrice de la Casa de Velázquez, et la commissaire Claude Bussac nous ont accompagnés pour la présentation des travaux de chacun et chacune des artistes présents.

Voici les artistes réunis par ordre alphabétique.
Assoukrou Aké (1995, Côte d’Ivoire, peinture, collage et gravure)

L’artiste multidisciplinaire élabore Une histoire de guérison en réponse à la violence des mécanismes de domination. Dans le rôle de l’artiste à la fois médecin et chercheur, il met en scène la figure humaine et la liane, la mythologie et le sacré. Il utilise l’image et la photographie.
Daniel Alvarado Bonilla (1985, Colombie composition musicale)

Il propose un ensemble de voix féminines, accompagnées de dimensions sonores électroacoustiques, instrumentales et musicales explorant les vestiges du rituel et du chagrin de la guerre, (à écouter).
Bahia Bencheikh-El-Fegoun (1976, Algérie, cinéma)

La réalisatrice travaille sur le thème de La Sorcière (Sorgina/Witch), femme condamnée, torturée, mise à mort par l’église, une histoire de féminicides et de lutte des femmes comme celle de Tao Amrouche.
Elle présente des moments de la vie de cette âme kabyle tourmentée qui transmettait la culture berbère. Elle a publié le roman « Le grain magique » (1966). Femme de lettres et chanteuse berbère, maîtresse d’un écrivain célèbre, elle est l’auteur de « L’Amant imaginaire » (1975).
Vincent Cardoso (1994, France, sculpture)

Il revisite l’art statuaire, manipule la matière avec le plaisir tactile d’un enfant. Il crée des œuvres qui traduisent le plaisir de retrouver son enfance. Il passe de la maquette au grand format, comme ici avec ces immenses vis de la série sur les accidents de bricolage.
Nicolás Combarro (1979, Espagne, arts visuels)

Pour contrer l’Amnésie et le silence autour des camps de concentrations, prisons, colonies pénitentiaires, prisonniers politiques, indésirables, son projet La Matière de l’Amnésie combine photos, sculpture, vidéos, archives pour tenter de comprendre cette période, en Espagne de 1936 à 1977, et en France, de 1938 à la fin de la seconde guerre mondiale.
Bastien David (France, 1990, composition musicale)

Le compositeur avec son œuvre Pulsar explore les formes de vie des sons qui se déplacent dans le temps et l’espace, afin de les percevoir à une échelle minuscule « incarner l’instrument joué et adopter son point de vue sonore ». Son œuvre sera présentée à la Cité de la Musique-Philharmonie de Paris, (à écouter).
Manon Delarue (1991, France, dessin, bande dessinée)

A Madrid, elle a découvert la puissance du Flamenco. Venu du sol, il insuffle à la danseuse une puissante énergie libérant le corps et l’esprit de toute agressivité ou violence.
Elle propose un regard féminin sur l’histoire de l’art.
Elle s’est intéressée à Artemisia Gentileschi qui a peint « Judith décapitant Holopherne » (1610), le général de Nabuchodonosor.
Les yeux de l’artiste peintre italienne violée par son précepteur sont dans l’exposition, et Manon Delarue lui offre une revanche avec sa représentation du désir sexuel dans une immense toile où l’œil de la femme, maîtresse de l’instant présent, a repris le pouvoir sur ses partenaires.
Olivia Funes Lastra (1995, Argentine, Arts plastiques)

Ses peintures textiles racontent une histoire personnelle en mouvement. Sa mère a quitté l’Espagne dans les années 1930 pour s’installer en Argentine. Elle est née à Buenos Aires. Venue s’installer à Paris, elle nous raconte cette histoire faite d’errance entre langues, écritures et cultures.
Bilal Hamdad (1987, Algérie/France, peinture)

Le musée du Prado lui a inspiré un nouveau concept, celui de la ville et du tumulte. Il nous présente Lueur d’un soir II et Immersion nocturne.
Tereza Lochmann (1990, république Tchèque, arts visuels, gravure)

Elle dessinait des humains qui jouent à être des animaux, mais à la Casa, elle a mis en scène la rencontre entre l’humain et le végétal, en utilisant des formes variées de chutes de bois à la manière d’un jeu de construction.
Regina Quesada (1978, Bourse Ajuntament de la Ciutat de València, Arts visuels)

Au cœur de son projet Piedras : Sobre une geologia del territorio. Elle explore une géologie du territoire avec de gros plans sur les éclats d’obus, les impacts sur la pierre du patio de la Casa.
Des blessures permanentes conservées dans un espace temps indéfini.
Elle prépare une thèse de doctorat au sein du département de dessin de la Facultzad de Belles Artes de San Carlos de Valencia
Camille Zéhenne (1985, France, vidéo, performance et écriture)

La vidéaste a réalisé un film documentaire en 16mm qui unit le mythe hispanique de l’or à la découverte de la Dame d‘Elche (Ve ou VIe siècle) découverte en 1897 près d’Alicante, de la naît une archéologie du désir queer enfoui, des relations charnelles oubliées, refoulées et libérées.

L’Académie de France à Madrid accueille, chaque année pour une durée de 11 mois, des artistes qui souhaitent développer un travail de création artistique en péninsule Ibérique, dans les dominantes artistiques suivantes : dessin, gravure, sculpture, peinture, architecture, composition musicale, chorégraphie, photographie, cinéma et vidéo.
1 – Lien vers la déclaration de l’Académie des beaux-arts à propos des coupes budgétaires.
2- Pour ceux qui voudront en savoir davantage sur cette résidence suivez le lien.
