Mercredi 1er décembre 2021, sous la Coupole de l’Institut de France, Erik Desmazières membre de ma section de gravure, directeur du musée Marmottant-Monet (Paris), a prononcé le discours d’installation de Pierre Collin qui a rejoint la section de gravure aux côté d’Astrid de La Forest, vice-présidente de l’Académie des beaux-arts 2021.
Il nous a ainsi brossé pas à pas et en détails un parcours qui inscrit plus d’une quarantaine d’expositions. Ils ne sont actuellement que trois dans cette section.
Pour cet artiste qui aime la bande dessinée « la frontière entre la gravure et la peinture n’existe pas. »
En 2017, sous cette Coupole, celui qui allait devenir académicien avait reçu le prix de bibliophilie Jean Lurçat pour Sol et Sombra (éditions l’Appuie-Tête, 2014), une série de 17 gravures eau-forte illustrant un poème de Pablo Picasso (1er mars 1938).
Peintre, graveur, dessinateur, au fil des années, il « dresse un journal, le journal de son regard. » Il dessine sa propre anthropologie inspirée de L’infra-ordinaire (1989) de Georges Perec. Il démultiplie les points de vue en séries de différentes formes, notamment en livre d’artiste, livre frise ou livre accordéon (leporello).
Depuis 2018, il développe un nouveau projet à partir de cages de verre placées entre son sujet et lui. Cette série en cours donne lieu à des paysages « recto-verso ». Une première boîte construite pour regarder la mer a été expérimentée pour la première fois à la Villa Montebello – Musée de Trouville. Elle y est actuellement présentée, jusqu’au 31 décembre 2021.
Pierre Collin a une exposition personnelle à la galerie Documents 15 à Paris en décembre 2021 et une autre au musée de la Cohue, musée des beaux-arts de la ville de Vannes avec son épouse l’artiste Corinne Véret-Collin en 2022-2023.
Portrait de son prédécesseur René Quillivic
Pierre Collin va nous démontrer à l’occasion du portrait qu’il dresse de son prédécesseur qu’il n’a pas connu mais documents à l’appui, que « l’enfance est bien la plaque vierge sur laquelle vont se graver nos émotions premières ».
Ce qui est son cas. Erik Desmazières avait évoqué ses débuts de graveur : « dans la cuisine de sa mère il a rempli des bacs d’acide nitrique pour faire mordre ses premiers essais gravés. »
Quant à René Quillivic son prédécesseur, décédé en juillet 2016, il est né dans une famille d’artistes.
Son installation à l’Académie datait d’octobre 1995.
Il a passé sa jeunesse à Carpentras. Un voyage en famille, en Italie « dans la terre de l’art marquera sa vie ».
Puis ce sera une monnaie rapportée de Grèce par son père. Il voudra alors graver en creux des pièces de monnaies en plâtre avec un couteau de cuisine et les couler en « étain fondu dans la pelle à cendres du poêle à charbons ».
Suivra la découverte de la peinture flamande, en Belgique Bruegel, en Hollande Rembrandt, sa maison et ses gravures. Sa mère lui achète un fac-similé de la « Pièce aux cents florins ».
Première commande de médaille en 1948 pour les marins de l’île de Sein qui s’étaient tous engagés lors de l’appel du Général de Gaulle, en juin 1940.
Pierre Collin soulignera que « l’Académie, n’est pas un podium sur lequel chaque académicien dans son beau costume se hisserait au-dessus des autres pour faire l’important, mais bien au contraire un lieu où ensemble, enrichi de nos différences, nous tachons d’être attentifs aux autres créateurs, jeunes et moins jeunes, où nous croisons nos champs d’expertises, nos parcours de vie.»
Une épée-matrice pour l’impression d’épée de papier
Le dessinateur Emmanuel Guibert qui avait présenté ses Biographies dessinées en 2020 à la galerie du Pavillon Comtesse de Caen de l’Académie des beaux-arts était venu remettre son épée à Pierre Collin.
Son épée de graveur est une épée-matrice gravée qui permet d’imprimer des épées de papier. Elle est plate à la lame large,« inspirée d’une épée de justice allemande découverte au Louvre, ni pointue, ni tranchante, elle est incapable de blesser. »
Le gabarit de l’épée réalisée sur une plaque de laiton de 5 mm, a été́ découpé́ au laser d’après son dessin. Deux faces gravées, deux paysages dans lesquels il évolue et qu’il partage avec ses fils. Sur chaque face figure son épouse Corinne.
La face Parisienne est dédiée à son fils aîné Samuel. On y retrouve, la passerelle Mornay au bassin de l’Arsenal, une vue du Louvre et du pont des arts depuis la lanterne de la Coupole, ainsi que la rue Mazarine. La face Bretonne est une vue à 360 degrés de la grève du Men du à marée basse, réalisée pour son second fils Valentin. Chaque fils sur le pommeau de sa face.