Beaux-Arts

Le graveur Ade Adesina, conteur et poète, un Griot qui questionne l’histoire de l’Humanité

Le lauréat 2023 du 9e prix international Mario Avati-Académie des beaux-arts est Ade Adesina. Né au Nigéria en 1980, il vit et travaille à Aberdeen. Arrivé en Écosse, à Aberdeen, au début des années 2000, il y a étudié la gravure à la Gray’s School of Art.

Graveur et imprimeur, peintre, sculpteur, il réalise aussi des installations.

Membre de la Royal Scottish Academy et du Royal Glasgow Institute, son œuvre gravée est présentée pour la première fois en France. Un rendez-vous à ne pas manquer. L’artiste est à découvrir au Pavillon Comtesse de Caen, Palais de l’Institut, jusqu’au 7 juillet 2024.

La proclamation du prix par le secrétaire perpétuel de l’Académie des beaux-arts Laurent Petitgirard et le président du jury Erik Desmazières de la section gravure et dessin, un moment d’émotion.

L’artiste a choisi de présenter une cinquantaine d’œuvres en noir et blanc

Pêle-mêle d’œuvres, interrogations sur le passé, le présent,
le futur

En gravure, il pratique la linogravure, l’eau-forte, la gravure sur bois. Il a exposé au Canada, en Italie, à Londres, à Dubaï.

Line of Duty, des triptyques modulables
Avant Line of Duty, il a fait ces deux linogravures, Déjà Vu

Deux triptyques, deux Line of Duty (ligne de conduite), ont été construits autour des Boucliers zulu, les Ishilunga, avec leurs bandes de couture.

Ils symbolisent le passé africain comme les coquillages, les cauris qui ont longtemps servi de monnaie entre l’Asie et l’Afrique.

L’histoire de ce Monde a évolué et doit aujourd’hui faire face aux nouvelles lois de la planète qui détruisent et avancent sans se retourner. Son regard pose un constat. Les temps changent… Nous retrouverons ses symboles sur de nombreuses œuvres.

Autoportrait (2024)

Le lauréat a réalisé, cette année, tout spécialement pour l’exposition son autoportrait, ainsi qu’un travail en collaboration avec Ahmad Ahmad : Twenty Twenty-four.

Ses images denses offrent des combinaisons.

Ses racines africaines s’unissent à la culture britannique et il y ajoute des images fixées au fil de ses voyages entre le Nigéria et l’Écosse mais aussi en Italie, en France, en Espagne, en Allemagne, aux États-Unis, au Canada.

Trickle, le filet 2018, travail en collaboration avec David Mach

De la ferme de son enfance au Nigéria, on retrouve les animaux, la volaille, le paon qui cohabitent avec des bêtes sauvages.

Les baobabs, symboles de force, de longévité, de résilience font souvent partie du décor.

Alors que les habitants des mers se mettent à voler, les bateaux s’ensablent, les nuages obscurcissent le ciel.

Pour garder le cap il nous fournit la boussole, construit des ponts, allume une lampe, installe un phare…

Les gravures du lauréat sont autant de questions posées sur le passé, le présent et l’avenir de la planète.

Le sablier du temps ne peut pas arrêter la déforestation, les industries, les politiques énergétiques qui épuisent la planète comme la Road to Riches (La route de la richesse qui date de 2015).

Sans oublier, la disparition des espèces sauvages que nous n’aurons pas pu sauvegarder, comme les pandas, les gorilles ainsi que les abeilles…

La linogravure réalisée avec le sculpteur David Mach Trickle (filet, 2018) filtre l’univers.

Vue de la dernière salle, au fond Conditional love (2019) la rose mise sous cloche pour qu’elle ne meurt pas mais que les abeilles ne peuvent plus butiner

L’artiste s’est intitulé Griot des temps modernes, il témoigne, commente, raconte l’histoire universelle et nous interroge. Les magnifiques paysages du Monde en perpétuels changements sont marqués par l’empreinte de l’homme qui les affecte.

Le secrétaire perpétuel de l’Académie des beaux-arts Laurent Petitgirard félicitant l’artiste

Chaque projet est un prétexte. Il nait d’une idée avec un objectif vers lequel il tend sans savoir ou cela le mènera, comme Les contradictions (2022) autour du phare. Le camion d’Ibadan, sa ville natale, transporte une brassée de fleurs.

Coline Serreau, vice-présidente de l’Académie des beaux-arts a découvert avec un vif plaisir le travail du lauréat.

Il peut choisir de poser des questions qui réclament des réponses.

Mais il donne à voir également après la question :  The View After the Question (2018) qui nous offre une réponse globale à ses interrogations.

L’idée initiale lui est venue durant un trajet en Espagne, de Madrid à Trujillo.

Sur la route, il a croisé de nombreux palais témoins d’un riche passé qui n’est plus.

Ces images ont rejoint celles d’un ancien Yemen détruit par la guerre.

Trois œuvres réalisées, de gauche à droite, en collaboration avec Tomasz Wrobel, Florence Poirier-Nkpa, Ian Burke.

Il aime créer des gravures en duo

Il a ainsi réalisé All Seasons avec Lennox Dunbar, son professeur à la Gray’s School of Art d’Aberdeen.

All Seasons (toutes les saisons, 2019) avec Lennox Dunbar

Il aime ces travaux en duo qui ne se déroulent jamais de la même manière et offrent de nouvelles approches avec Michael Agnew, Tomasz Wrobel, June Carey ou encore Florence Poirier-Nkpa pour A l’Aube ci-dessous.

Les deux artistes se sont retrouvés à Saint-Martin.

A Saint Martin, lors d’une résidence pendant de la période de Covid. Ils ont réalisé : A l’aube (Sunrise, 2020), qui montre les contrastes de la vie durant cette période. L’enfant roi en Goldorak a quitté son trône et la Vierge Marie masquée pour se protéger de l’épidémie arrive avec son bagage. La multiplication des boîtes aux lettres relie l’île au reste du Monde, l’avenir se lit dans les coquillages, avec la boussole gardons la bonne direction. Le phare est là, les ondes du sable se redessinent sans cesse, les baobabs sont reliées par un pont de singes.

Avec Barry McGlashan, That last Great Day (2014), il nous propose une vision de l’ultime jour de notre planète avec le dernier souffle d’une baleine échouée et un homme, sans doute un explorateur qui pleure devant le spectacle du désastre qui s’offre à lui.

Photo souvenir de g. à d. , des membres du jury : Cécile Pocheau-Lesteven chargée de collections à la BNF, Florian Rodari écrivain, éditeur, conservateur et Erik Desmazières membre de la section gravure et dessin de l’Académie des beaux-arts ; le lauréat et sa famille : Zelda, Emma son épouse et Frida, son frère Lloyd et Anna ; Astrid de La Forest et Pierre Collin membres de la section gravure et dessin de l’Académie des beaux-arts.
Le catalogue de l’exposition, en anglais

Le catalogue édité et publié par l’artiste réunit les 50 œuvres présentées actuellement à Paris et d’autres.

Il apporte de précieuses informations sur son remarquable travail qui restait méconnu en France et nous permet de le voir au travail dans son atelier.

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